NEPTHYS •• Looking through the glass... [OVER]

Ma mère laissait sa colère s'abattre sur moi. Cela faisait si longtemps qu'elle empêchait tout cela de sortir. Toute cette haine et cette rancœur qu'elle ressentait contre l'humanité toute entière. Contre un mari qui n'était jamais là. Qui avait préféré partir découvrir le monde avec un enfant qui n'était pas le siens, avec un gamin, un garçon, ce qu'elle, elle n'avait pas su lui donner. Elle me le reprocher alors. Comme si j'avais eu le choix d'être une fille ou non. Comme si je n'aurais pas moi même voulu que mon père m'aime comme il aimait cet enfant perdu qu'il avait recueillit, ce Leeroy qui je haïssais de tout mon être pour m'avoir volé mon père. Mais, je ne m'y étais pas attendu, je ne m’attendais pas à toute cette colère de la part de cette mère qui elle, ne m'avait jamais laissée tomber. Elle n'avait jamais agit ainsi envers moi, elle m'avait toujours protégée de tout, elle n'avait jamais levé la voix sur moi. Je paniquais malgré moi alors qu'elle m'insultait, qu'elle m'accusait de choses que je considérais comme horrible. Quelque part, je savais qu'elle ne le pensait pas vraiment, qu'il lui manquait tout simplement, comme il me manquait à moi mais, je ne pus m'empêcher de pleurer tout en tremblant puis, sans demander mon reste, je fis volte face et commençais a grimper les escaliers a toute allure. Mais, a peine étais je arrivée en haut des marches que la sonnette retentit. Je m'immobilisais, une main sur la rambarde puis, tournais la tète pour apercevoir la porte d'entrée que ma mère ouvrit au même moment. C'est alors que je vis une silhouette masculine se dessiner, l'air grave, dans l'entrebâillement de la porte. Je fis volte face. Redescendis d'une marche. De là où je me tenais, j'entendais toute leur conversation. L'intonnation de cet homme dont je ne voyais pas le visage. Ses paroles qui me transpercèrent le coeur. Je descendis une nouvelle marche sans mème m'en rendre compte. Ma main tremblant sur la rambarde, mes jambes flageolant, ma tète me faisant étrangement mal, mes yeux s'emplissant de larmes sans que je ne comprenne vraiment pourquoi, mon rythme cardiaque s'enflammant. Un silence insupportable s'installa dans la pièce. Le temps que mes jambes cessent de me porter et que je tombe, assise sur une marche, ma main toujours appuyée contre la rambarde en bois. Le temps que ma mère laisse aller sa main jusqu'à devant sa bouche, pour étouffer un cri. Finalement, elle se tourna lentement vers moi. Nos regards se croisèrent. Emplis de larmes. Puis, elle tourna les talons, laissant la porte ouverte, se contentant de marcher jusqu'à la cuisine, comme si de rien n'était. Reprenant son activité, continuant à faire sa tarte aux pommes. Comme si cela ne lui procurait aucune peine. Comme si elle ne voulait pas s'avouer la réalité. Comme si elle voulait continuer a faire comme s'il était simplement loin de nous. Encore. Mais qu'il rentrerait. Un soir. Pour nous serrer dans ses bras et nous dire qu'il nous aimait malgré tout.

Mon père. Je ne le voyais que peu et pourtant. Il comptait tellement pour moi. Tellement. « Nepthys ? » ouvrant de grands yeux ronds, je regardais l’homme se tenant là, sur le seuil de la porte, l’air grave et désolé. Je ne le connaissais pas. Quoi que son visage me fut familier. Je restais donc là, silencieuse et craintive, assise sur une marche au milieu de l'escalier alors qu’il s’approchait de moi, entrant dans la maison, marchant vers l'escalier comme si de rien n’était, comme s'il avait été chez lui. « Ton père voulait que je... » Je me relevais d'un bond, un léger rire nerveux s’échappant de ma bouche alors que je regardais soudainement cet homme avec mépris, lui répondant d’un ton sec tout en descendant vers lui, comme pour le pousser dehors. « Mon père est mort, non? Alors qu'il y a t'il a ajouter? » Alors que j'arrivais à sa hauteur, il me saisie par le bras avec poigne. « Qu'il t'aimait et que sa dernière pensée fut pour toi. » Un nouveau rire de ma part. Je n'en croyais rien. « Tu ne devais pas le connaitre pour dire ce genre de choses. Mon père n'a jamais eu de temps pour moi, je n'ai jamais été assez bien pour lui! » L'homme secoua la tète avec tristesse, encrant son regard bleu dans le miens. « C'est toi qui ne le connais pas pour dire ce genre de choses! » Fronçant les sourcils, je me retournais avec l’intention de gifler cet homme que je trouvais des plus présomptueux. Mais, il fut plus rapide que moi et, c’est sans me quitter des yeux qu’il me stoppa dans mon mouvement. Suite à quoi, il me força à le regarder. « A quoi tu joues Blondie ? Tu ne me reconnais pas ou quoi ? » Ma lèvre inférieure se mit à trembler. Son visage m'était familier mais, mon esprit semblait ne pas vouloir me donner de réponse à cette question. « A croire que tu es toujours une sale gamine qui refuse de partager son papa! » Il avait parlé avec tant de mépris que tout m'était revenu en mémoire d'un seul coup, son visage, le passé...

La haine que je ressentais pour lui. Cet adolescent de dix sept ans qui se permettait de me voler mon père, qui était ce fils qu'il avait toujours rêvé d'avoir, me relayant un peu plus au second plan. Je me sentais alors soudainement à nouveau cette petite fille de dix ans qui, en entendant son papa rentrer un soir s'était précipitée dans le hall pour sauter dans ses bras. Mon mouvement, ce soir là, fut stopper par une présence aux cotés de mon père. Un adolescent avec un air triste et qui semblait être en colère. Il était resté là, derrière mon père, silencieux et perdu. Je l'avais alors regardé avec de grands yeux curieux alors que mon père nous l'avait présenté. Il était resté évasif, le présentant comme un garçon qui avait récemment perdu ses parents, comme un jeune homme qu’il devait aider. J’avais instantanément ressentit ce regard qu’il avait posé sur lui, cette façon qu’il avait eu de le regarder tout en parlant de lui. Il l’avait regardé avec douceur et compassion. Comme un père regarde son fils. Moi, j’avais aussitôt ressentit colère et jalousie. Une envie folle de le mettre dehors, de le pousser hors de nos vies, pour garder mon papa juste pour moi. Mais, il n’y avait rien eu a faire, tout ce que j’avais pu dire ce soir là et, le lendemain ne fut interprété que comme de la jalousie et de la méchanceté, m’incitant sans cesse d’avantage à haïr ce garçon qui me volait mon père.
Ce garçon qui se tenait là devant moi ce soir, m’annonçant le décès de ce père qu’il m’avait volé. M’annonçant que je ne le connaissais pas. Mais la faute à qui hein ?

L’espace d’une seconde, j’hésitais à lui sauter dans les bras, à le serrer contre moi pour pleurer contre lui, dans des bras rassurants, dans les bras de quelqu’un qui avait été plus proche de mon père que je ne le serais jamais. Je voulais lui demander de me parler de lui, de me dire qui était mon père, pourquoi il n’était jamais auprès de moi quand j’avais besoin de lui. Pourquoi il n’avait pas été là pour poser mille et une questions à mon premier petit ami ou, pour l’intimider afin qu’il ne me fasse pas de mal. Pourquoi n’avait il pas été là pour être fier de moi dans ma belle robe rose le soir de mon bal de promo. Pourquoi n’avait il pas été là pour me crier dessus le soir où j’ai finis au poste de police pour avoir conduit en état d’ivresse. Pourquoi n’avait il pas été là pour me réconforter quand j’étais tombée de la tour de jeux au jardin d’enfants et que je m’étais cassé le bras. Pourquoi n’avait il jamais été là dans les moments importants de ma vie. Tant de questions qui me trottait dans la tète et qui me rappelait qu’à présent, il ne serait vraiment plus là. Toute ma vie j’avais espéré que mon paternel ferait au moins un effort pour assister à mon mariage, pour voir mon premier enfant. Et, c’est pour cela que je lui avais pardonnées toutes ses absences. Mais non, il ne le serait pas. Et, c’était de la faute de Leeroy. Alors pourquoi pleurer dans ses bras ?

Au lieu de cela, je me débattais, je me dégageais de son étreinte, lui hurlant au visage de partir de chez nous, que tout était de sa faute, que je ne voulais plus qu’il ose franchir ne serait ce qu’une fois le seuil de cette porte. Il resta impassible face à mon hystérie, attendant patiemment que je finisse de hurler puis, d’un ton calme et résigné, il répliqua « J’ai fais une promesse à ton père blondie, celle de veiller sur toi et, je m’y tiendrais, que tu le veuilles ou non ! » Je lâchais un énième rire nerveux « Comme si j’avais besoin qu’on veille sur moi ! ». Leeroy poussa un léger soupir puis, se résigna, me tournant bientôt le dos pour franchir le pas de la porte.

Mon père n’a jamais été le genre d’homme à me prendre dans ses bras quand je pleurais, ni même a tenté de me réconforter. Il était plutôt le genre d’homme à me dire que, ce qui ne tue pas, nous rend plus fort. Que toutes ces blessures que je me faisais à l’école, les garçons qui déchiraient mes dessins, les filles qui tiraient mes cheveux, tout cela ne feraient que m’endurcir. Alors, je n’osais pas pleurer devant lui, je n’osais pas me plaindre devant lui. Je me contentais de lui dire que j’avais des bonnes notes à l’école et que j’étais sage avec ma mère quand il n’était pas là. Et, il n’était jamais là. Et, il ne le serait plus jamais. J’étais là, assise sur mon couvre lit bordeaux, a pleurer toutes les larmes de mon corps, seule. J’avais cette sensation de vide en moi, cette sensation que rien ne pourrait jamais me faire me sentir mieux. Jamais. Bien que je ne connaisse que peu cet homme, il avait été et resterait mon père. Un léger rire se dessina parmi mes larmes. J’entendais encore sa voix me dire que je ne devais pas pleurer, que cela ne pouvait que me rendre plus forte. C’est alors que la douleur s’intensifia dans ma poitrine. Un manque infini. Je ne savais plus quoi faire. J’avais mal, j’étais seule. C’est alors que mon regard bleuté se posa sur mon téléphone portable. Je me jetais presque dessus. Les larmes continuaient de glisser sur mes joues mais, je n’y prêtais plus attention, farfouillant parmi le répertoire de mon téléphone à la recherche d’un numéro. De son numéro. Bientôt je le trouvais et, un sourire se dessina sur mes lèvres, un léger sourire mais, un doux sourire. J’appuyais sur la touche d’appel et collais le téléphone contre mon oreille. Une sonnerie. Puis une seconde. Et le répondeur. Je ne pus que me mettre à pleurer de plus belle en entendant le bip sonore. Suite à quoi, de colère, je jetais le téléphone à travers la pièce. Celui-ci vint percuter un mut et se brisa, retombant sur le sol en deux morceaux. Le vide en moi s’intensifiait alors que je me jetais sur mon oreiller, ivre de chagrin. Abandonnée par les deux hommes de ma vie. Abandonnée par les deux seules personnes qui comptaient vraiment à mes yeux en dehors de ma mère. Les larmes refusant de cesser de couler alors que j’avais l’impression que je ne pourrais plus jamais me relever de ce dernier coup de massue. J’avais couché avec Soren et, il ne voulait plus entendre parler de moi. Je n’étais rien d’autre qu’une trainée. Une fille facile tout juste bonne à offrir son corps. Je n’avais rien été d’autre pour celui que je voyais comme mon meilleur ami depuis notre enfance. Car oui, jusqu’à ce que je couche avec lui ce soir là, il avait été la seule figure masculine de mon enfance, le seul garçon de ma vie a toujours rester près de moi. Mon héro, celui qui m’avait protégé et défendue face aux autres enfants dans la cour de l’école, celui qui m’avait accompagnée à mon bal de promo, celui qui était comme un frère, celui qui était tout. Celui avec qui j’avais fait l’erreur de coucher. Puisqu’il n’était rien d’autre qu’un homme comme tous les autres. Un sale type seulement obsédé par le sexe. Mes yeux regorgèrent de d’avantage de larmes alors que j’agrippais avec fermeté mon oreiller pour y plonger mon visage et y étouffer mes larmes.

Les jours s’égrainèrent ainsi. Entre larmes et dépression, solitude et colère jusqu’à ce que les choses fussent limpides à mes yeux. Si Soren ne m’avait vu que comme une trainée alors, c’est ce que je serais. Après tout, j’avais des atouts alors, autant m’en servir. Je ne tardais plus à me décider. Je saurais qui était mon père. Qui l’avait tué et comment. Je saurais tout ce que je voulais savoir et ce, peu important si je devais m’abaisser à coucher avec Leeroy pour avoir les réponses à mes questions. Peu important ce que je découvrirais et ce que cela m’apporterait. J’avais été abandonnée par deux fois, par deux hommes que j’aimais. Ma vie n’était qu’un tissu de mensonge. Je le savais, je le sentais. Mais, cela ne durerait plus, je ne laisserais pas ma vie continuer sur cette voie. Je n’en serais plus la spectatrice mais l’actrice a part entière. Peu importe les sacrifices. Je saurais la vérité et, je vengerais mon père.